La vocation de l'éditeur
Pas de nouveautés cette quinzaine, nous avons été occupés au Salon du Livre de Genève. Encore nimbée de l'ambiance littéraire avec l'odeur du livre neuf dans les narines, j'ai envie de raconter les couloirs du métier d'éditeur:
Éditer, verbe transitif. Sens 1 : Publier et mettre en vente une oeuvre [Littérature]. Synonyme : imprimer. Sens 2 : Présenter des informations [Informatique].
Éditer signifie donc publier aussi bien que travailler un texte. L'informatique l'a compris quand, sur votre ordinateur, «éditer» un fichier signifie double-cliquer sur son icône pour l'ouvrir, avoir accès à son contenu et le modifier à votre convenance.
Voilà précisément le travail de l'éditeur une fois qu'il a sélectionné, parmi les pléthoriques propositions de manuscrits qu'il reçoit, celui qui correspond à ses critères de choix. La ligne éditoriale d'un éditeur, c'est comme les goûts et les couleurs, ça ne se discute pas. Là est l'éthique, l'âme du métier: l'éditeur est au service de la culture, — il devrait ratisser large, à la limite, il devrait éditer tout ce qui est écrit, pourquoi pas? — il ne le fait pas, tout n'est pas d'un intérêt minimum, loin s'en faut. Il n'est pas un censeur, mais il doit, bien sûr, savoir trier le bon grain de l'ivraie. À l'instar du juge dans son Tribunal qui doit se plier à la loi, l'éditeur adopte des critères de choix et, au final, tous deux décident selon leur intime conviction.
De nos jours, afin d'avoir une chance de sortir du lot, il convient de publier ce qui est mieux que bien écrit, du moins en matière d'inédits. Un français impeccable, une grammaire convenable, une orthographe irréprochable, le tout mâtiné d'un style personnel, voilà les ingrédients indispensables pour qu'un manuscrit ait ses chances d'être publié; ceci pour la forme.
Pour le fond, si l'éditeur adopte une certaine direction dans ses publications, il ne les approuve pas toutes pour autant. Il sait diffuser des contenus aptes à ajouter à la culture et au discernement du lecteur, même s'ils sont provocants, sujet à controverse ou, tout simplement, pas de son opinion personnelle. Il choisit de publier un essai intéressant, un roman captivant, un beau livre de reportage qui répondent à une certaine exigence de qualité.
Dans un monde idéal, la vocation de l'éditeur, c'est d'éditer, c'est lui qui est au départ de l'aventure d'un livre, c'est lui qui décide s'il sera offert au public ou non, sous quelle format et quelle couverture.
C'est cette petite chose en papier de 18x24 cm qui, une fois monnayée sur le marché, va faire vivre plusieurs corps de métier.