Les grands initiés
La Science et la Religion, ces gardiennes de la civilisation, ont perdu l’une et l’autre leur don suprême, leur magie, celle de la grande et forte éducation. Les temples de l’Inde et de l’Égypte ont produit les plus grands sages de la terre. Les temples grecs ont moulé des héros et des poètes. Les apôtres du Christ ont été des martyrs sublimes et en ont enfanté par milliers.
L’Église du Moyen Àge, malgré sa théologie primaire, a fait des saints et des chevaliers, parce qu’elle croyait et que, par secousses, l’esprit du Christ tressaillait en elle. Aujourd’hui, ni l’Église emprisonnée dans son dogme, ni la Science enfermée dans la matière ne savent plus faire des hommes complets. L’art de créer et de former les âmes s’est perdu et ne sera retrouvé que lorsque la Science et la Religion, refondues en une force vivante, s’y appliqueront ensemble et d’un commun accord pour le bien et le salut de l’humanité.
Pour cela, la Science n’aurait pas à changer de méthode, mais à étendre son domaine, ni le christianisme de tradition, mais à en comprendre les origines, l’esprit et la portée. Ce temps de régénération intellectuelle et de transformation sociale viendra, nous en sommes sûrs.
Déjà des présages certains l’annoncent. Quand la Science saura, la Religion pourra, et l’Homme agira avec une énergie nouvelle. L’Art de la vie et tous les arts ne peuvent renaître que par leur entente. Mais en attendant, que faire en cette fin de siècle, qui ressemble à la descente dans un gouffre, un crépuscule menaçant, alors que son début avait paru la montée vers les libres sommets sous une brillante aurore? — La foi, a dit un grand docteur, est le courage de l’esprit qui s’élance en avant, sûr de trouver la vérité. Cette foi-là n’est pas l’ennemie de la raison, mais son flambeau; c’est celle de Christophe Colomb et de Galilée, qui veut la preuve et la contre-épreuve, provando e riprovando, et c’est la seule possible aujourd’hui.
Pour ceux qui l’ont irrévocablement perdue, et ils sont nombreux — car l’exemple est venu de haut, la route est facile et toute tracée: — suivre le courant du jour, subir son siècle au lieu de lutter contre lui, se résigner au doute ou à la négation, se consoler de toutes les misères humaines et des prochains cataclysmes par un sourire de dédain, et recouvrir le profond néant des choses — auquel seul on croit — d’un voile brillant qu’on décore du beau nom d’idéal — tout en pensant que ce n’est qu’une chimère utile.
Quant à nous, pauvres enfants perdus, qui croyons que l’Idéal est la seule Réalité et la seule Vérité au milieu d’un monde changeant et fugitif, qui croyons à la sanction et à l’accomplissement de ses promesses, dans l’histoire de l’humanité comme dans la vie future, qui savons que cette sanction est nécessaire, qu’elle est la récompense de la fraternité humaine, comme la raison de l’univers et la logique de Dieu; — pour nous, qui avons cette conviction, il n’y a qu’un seul parti à prendre: affirmons cette Vérité sans crainte et aussi haut que possible; jetons-nous pour elle et avec elle dans l’arène de l’action, et par-dessus cette mêlée confuse, essayons de pénétrer par la méditation et l’initiation individuelle dans le Temple des Idées immuables, pour nous armer là des Principes infrangibles.
C’est ce que j’ai tenté de faire dans ce livre, espérant que d’autres me suivront et le feront mieux que moi. (E. Schuré)
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