Ouverture de l'école de philosophie transmutatoire métallique
«C’est à vous et pour vous, chers Enfants de la Doctrine Dorée, que j’ouvre ce jourd’hui les sacrés secrets de l’École de la Philosophie transmutatoire, pour vous y faire voir à l’œil, et toucher au doigt la véritable interprétation de tous les Styles, desquels les habitants de la Montagne Chimique se sont servis, pour cacher leur terre feuillée aux impies ennemis jurés de Dieu, et des Doctes Nourrissons de la Nature. Leurs Allégories, Paraboles, Problèmes, Types, Énigmes, dires Naturels, Fables, Portraits et Figures, y seront parfaitement expliqués, et mis en leur jour: les accompagnants de la vraie exposition de la Matière, si une ou plus, son nom, si un ou plus, ses circonstances, ses actions et opérations, le lieu et le temps auxquels elle se trouve: Conséquemment quelle est cette Matière, et comme vraiment elle se nomme.
Ensuite nous déduirons le moyen d’opérer en cet Art, si un ou plus et quel. Et tout d’une main, le Feu, le Four, le Vaisseau, Poids, Temps et lieu de l’Opération: Ensemble le Temps de la Perfection, les Signes, ou Couleurs: finalement la Naissance, Augmentation et Projection de la Pierre. Quoi faisant on verra l’accord de tous les vrais Secrétaires de la Nature qui semblaient se contredire; et par ce moyen, ayant découvert la Vérité de cet Art, vous confesserez qu’il est licite, utile, honnête, et vertueux, ne répugnant en nulle façon à la Foi de l’Église Catholique, Apostolique et Romaine. Qu’il soit licite, nous l’avons fait voir dans notre Bouquet Chimique, où nous rapportons l’autorité des Jurisconsultes qui l’ont approuvé.
Qu’il soit honnête, il n’en faut autre preuve que ses grands Rois et Princes qui l’ont exercé, lesquels nous avons aussi remarqués au même livre susdit: d’où nous pouvons retirer qu’il est aussi vertueux. Ce Grand Hermès, tant de fois appelé trois fois Grand par ses successeurs : eut-il tant peiné pour nous rendre possesseurs de cet Art, s’il ne l’eut reconnu honnête et vertueux? Pythagore surnommé de Plutarque l’Enchanteur, l’eut-il enseigné publiquement s’il n’eût été licite, honnête et vertueux? les obscures Sentences, duquel, ou de ses Disciples nous avons encore aujourd’hui sous le Titre de Tourbe des Philosophes. D’ailleurs Aristote par la lettre qu’il en écrit à Alexandre le Grand, nous fait voir l’honnêteté de cet Art, puisqu’il semond un Grand Roi (tel que celui-là) à la recherche d’icelui. Davantage qu’il soit licite et honnête, David, Salomon, et Esdras, nous en tendent témoignage. Le premier au Psaume onze, les paroles de Dieu sont paroles nettes, et pures comme argent, examiné par le Feu, et purgé de la terre par sept fois. Le second en l’Eccles. Chap. 38.
Le Tout-puissant a créé la Médecine de la Terre, et l’Homme prudent ne la méprisera point. Le troisième, livre 4. Chap. 8. Interroge la Terre, et elle te répondra que Dieu donne beaucoup de Terre pour faire des pots; mais il donnera un petit de poudre pour faire de l’Or. Or si les Rois profanes et sacrés en ont eu connaissance, les Saints personnages ne l’ont pas ignoré. Saint Thomas l’a pratiqué, et il a laissé quelque chose par écrit qui se trouve encore de ce jour. Et le Béat Albert le Grand son Maître en a écrit bien amplement. Morienus un bon Hermite (qui enseigna le Roi Calid) l’a exercé. Et tant d’autres, que j’omets pour cause de brièveté, joint que nous en avons écrit assez amplement en notre Bouquet Chimique susdit: c’est pourquoi nous viendrons à son utilité. Or est-il tellement utile, que j’oserai dire que sans lui notre vie n’est qu’une mort, notre repos un tourment, et agitation; notre calme une Mer agitée des flots écumeux de toutes sortes de misères. Car outre que Dieu nous rend possesseurs par icelui d’une source perpétuelle de richesses qui ne tarit jamais, et d’une santé non défaillante, que lorsqu’il plaira à Dieu; il nous donne encore la Science et la Sagesse, lesquelles ont cette prérogative de nous donner la Clef pour ouvrir le Cabinet de la Nature, et nous rendre possesseurs de ses effets les plus cachés.
C’est pourquoi on peut dire avec vérité, que tous les Arts ont puisé de celui-ci, ainsi qu’autrefois les plus grands Sculpteurs tiraient les meilleurs traits et linéaments de leurs ouvrages de la seule Statue de Policlitus. Tellement qu’étant possesseurs de cet Art, notre vie est environnée de murailles si fortes, que nous pouvons dire hardiment, viennent quant elles voudront, les maladies viennent les pauvretés, viennent le Chagrins, les soucis, et la perte, elles ne feront aucune brèche a cette Citadelle; laquelle étant à l’épreuve de toutes les bourrasques de la Mer, de tous les accidents de la Terre, les changements des Airs, et des influences du Ciel, en brave tous les effets; tellement qu’étant comblé de tout ce qu’on peut souhaiter en Terre, on n’aspire à autre chose qu’à un quatrième bien qui durera Éternellement, lequel est la jouissance du Créateur de toutes choses.»
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